Figure de l’art romand du 20e siècle, Albert Chavaz (1907-1990) est connu pour ses peintures. Mais bien moins pour ses estampes. A Vevey, le musée Jenisch montre cet aspect de son œuvre. C’est très estimable.
Paysages du Valais, mais pas seulement. Scènes de la vie quotidienne. Portraits et nus féminins. Natures mortes. Et, de façon générale, le goût d’une peinture feutrée bien qu’assez colorée; la modernité d’un réalisme figuratif; un style qui se décante dans une plastique à la mate résonance. C’est l’Albert Chavaz que l’on a l’habitude de voir. Et d’aimer.

Cet artiste est la queue de comète de l’Ecole de Savièse. On sait qu’il n’aimait pas qu’on le rattache à ce «Barbizon suisse» qui troqua la forêt de Fontainebleau pour les Alpes valaisannes. Albert Chavaz le Genevois avait pourtant fait le voyage du Valais comme ses prédécesseurs, Ernest Biéler, Edouard Vallet et Marguerite Burnat-Provins pour citer les plus doués. Il découvrit le Vieux-Pays en 1934 quand il dut décorer l’église de Fully avant de s’installer définitivement à… Savièse en 1940. Il y trouva son foyer créatif, inspiré par les montagnes, la vallée du Rhône, les gens du cru même s’il ne donna pas dans le pittoresque. Cet artiste est aussi connu pour ses fresques, ses mosaïques, ses céramiques. Il n’est néanmoins pas certain que ses gravures viennent de suite à l’esprit de ses admirateurs. Albert Chavaz. L’approche d’un peintre (cette peinture qui décidément le poursuit) montre justement une cinquantaine de ses estampes, surtout des aquatintes et des lithographies en couleurs. Le musée Jenisch (commissaire: Julie Eggel) propose ainsi un nouvel accrochage sur un de ces artistes romands qu’on peine à voir honoré dans d’autres institutions de la région. Une bonne chose.
Prunes et truites
Le titre de l’accrochage confirme l’empreinte du peintre sur ses estampes. Chavaz est reconnaissable. Initié aux techniques de la gravure par les membres de l’Atelier de Saint-Prex durant les années 1970 – son nom s’est retrouvé aux côtés de ceux de Michel Duplain, d’Edmond Quinche, de Gérard de Palézieux, de Pierre Tal Coat et de Pietro Sarto –, il est bel et bien demeuré dans le sillon de son style.

Ses natures mortes sont réussies. Grès. Prunes. Truites. Bouquets de camélias, de dahlias ou d’hellébores. Chavaz se rapproche quelque peu de Gérard de Palézieux et penser à Giorgio Morandi n’est pas déplacé – on songe aussi à Filippo De Pisis. Ses voyages hors du Valais (Tessin, Grisons, France, Italie) retiennent l’œil: épures, à nouveau, et peu de personnages. L’art de la gravure est là, rien à redire. C’est du Chavaz. Et de fort jolie facture.
Albert Chavaz. L’approche d’un peintre. Musée Jenisch. Av. de la Gare 2, Vevey. Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h (jeudi jusqu’à 20 h). Jusqu’au 2 novembre.