Sortir de l’emprise Spécial
Faire table rase, tout détruire, se retrouver seul: telle est la triste réalité de ceux qui parviennent à sortir d’une emprise sectaire. Cette douloureuse démarche porte un nom: la déprise. Témoignages d’anciens adeptes.
«Nul n’est à l’abri, arme la réalisatrice Karine Dusfour en parlant de ceux qui tombent dans l’emprise sectaire. J’ai découvert des gens intelligents habités par la volonté de changer le monde ou une recherche intellectuelle.» Loin du cliché des victimes réduites à des illuminés crédules ou vulnérables. Son reportage Adeptes, de l’emprise à la déprise donne la parole à d’anciens adeptes Qui se sont tous posé la question: «Mais qu’est-ce que je fais après?» Nicolas, enfant de Témoins de Jéhovah, a déjà été conditionné dans le ventre de sa maman. Il raconte ses terreurs enfantines face au «monstre Satan» et ses démons, sa différence moquée à l’école et son isolement à l’adolescence. Avant son réveil et sa décision de couper les ponts avec sa famille. Julie, abusée par le gourou soi-disant humaniste de l’Université de la nature et de l’écologie, s’est laissée accuser à sa place avant de finir en prison et de prendre conscience de sa crédulité. Quant à David et François, adeptes de séances de kung-fu, ils ont rejoint les Guerriers de lumière pendant dix ans.
Se reconstruire
Tous racontent les étapes de l’emprise et les mécanismes de la manipulation avec lucidité et émotion. Le chemin du désengagement implique une réévaluation critique des croyances et des pratiques du groupe, une reconstruction de l’identité personnelle et un travail sur les traumatismes et les séquelles émotionnelles laissées par l’expérience sectaire. Il faut pouvoir accepter d’avoir été membre d’une secte et être capable de penser à nouveau par soi et pour soi. La déprise est donc un processus long, complexe et dicile qui nécessite bien souvent un soutien psychologique et un accompagnement de proches et de professionnels. Alors que, comme le constate David: «La déprise, c’est ultraviolent. Tu es seul». C’est le prix à payer pour «sortir des ténèbres», comme le démontre ce remarquable documentaire.