Prestations complémentaires Spécial
Pour la première fois, une étude d’ampleur nationale indique que 230’000 seniors précaires ayant droit à un soutien financier ne le réclament pas. Par méconnaissance de ces prestations complémentaires (PC) de l’AVS, mais aussi par honte ou par peur.
Les PC?
Sans les prestations complémentaires, nombre de retraités habitant en Suisse n’arriveraient pas à joindre les deux bouts. Elles offrent un soutien à tous ceux dont les rentes de l’AVS et de la prévoyance professionnelle ne permettent pas de vivre décemment. Il s’agit d’un droit pour lequel le citoyen a cotisé – pas d’une aide sociale – accordé à 12% des rentiers AVS. Pourtant, révèle une étude publiée le 3 avril par la Haute école zurichoise des sciences appliquées dans le cadre de l’Observatoire national de la vieillesse de Pro Senectute, ce chiffre doublerait si les «non-recourants», au nombre de 230’000, faisaient valoir leurs droits!
Par méconnaissance?
Une bonne partie des personnes identifiées par l’étude menée sous les auspices de Pro Senectute ne connaissaient pas l’existence de cette aide ou s’imaginaient ne pas y avoir droit. Il s’agit des retraités les moins formés ou de nationalité étrangère. D’autres y renoncent en raison des obstacles administratifs, de la longue liste de formulaires à remplir et des nombreux documents à fournir. Les personnes seules en particulier. A noter que les non-Européens doivent avoir habité en Suisse de manière ininterrompue durant dix ans pour y avoir droit – cinq ans pour les réfugiés et les apatrides.
Par honte? Par peur?
Pro Senectute a remarqué, lors des consultations qu’elle offre tout au long de l’année, que certaines personnes «ne veulent pas être stigmatisées en tant que bénéficiaires de PC». Difficile d’accepter, quand on a cotisé toute sa vie, que cela ne suffit pas pour vivre dignement. L’association qui depuis 106 ans contribue à améliorer la vie des personnes âgées signale aussi que des personnes «n’ayant pas la nationalité suisse craignent de perdre leur droit de séjour si elles touchent ces prestations». D’autres encore refusent d’être un fardeau pour l’Etat ou de dépendre de l’argent des «autres».
Rejet de l’Etat?
Les aînés qui refusent sciemment les prestations complémentaires ne sont pas les seuls à faire ce genre de choix. Spécialiste du non-recours aux assurances sociales, la chercheuse à la Haute école de travail social de Fribourg Frédérique Leresche rappelle en effet que certains citoyens renoncent aux aides, car ils rejettent «le contrôle de l’Etat et l’idée qu’il détient le pouvoir symbolique et institutionnel de décider ce qui est bon pour eux». Quelles solutions? Renforcer le lien entre les individus et l’Etat en simplifiant l’accès aux droits. «Certaines informations n’existent qu’en allemand, en français ou en italien. Il faudrait les traduire dans d’autres langues», estime Alexander Widmer, membre de la direction de Pro Senectute Suisse. Des améliorations qui, avec le vieillissement de la population et le renchérissement du coût de la vie, pourraient avoir d’importantes conséquences: si l’aide non réclamée était automatiquement versée aux seniors concernés, 100’000 personnes en Suisse sortiraient directement de la pauvreté, selon Selon Pro Senectute.
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