L’avenir de la culture Spécial
Le grand retour des festivals rythme la vie des Suisses, cet été plus que jamais. On sait pourquoi: les mélomanes en ont été sevrés par la pandémie. Si certains ont pu goûter aux joies de la musique en plein air l’an dernier, c’était dans des conditions rebutantes: masquée, la fête n’était pas au rendez-vous; elle ne l’est vraiment que maintenant.
Chacun (ou presque) court les événements tel une cigale avide de refrains entonnés à tue-tête, surtout au coude-à-coude. «On ressent la même chose qu’un plongeur qui, après une apnée, retrouve le bonheur de respirer», a imagé Daniel Rossellat, le patron du Paléo, ému aux larmes par le retour en force de 250’000 spectateurs sur la plaine de l’Asse à Nyon. Il y a beaucoup de cela dans cette soif de rattrapage. Observons cependant que le plongeur aime le vertige des profondeurs, là où il souhaite précisément se rendre. Emerger à la surface est un soulagement physiologique, mais pas un but en soi: plutôt la fin naturelle d’un exploit.
Ce «retour en force» de la culture ne doit pas faire illusion.
C’est que tout n’est pas si rose dans le monde de la musique. Ce «retour en force» de la culture – mot totem qui recouvre tout et n’importe quoi – ne doit pas faire illusion. Si plus d’une personne confinée s’est découvert une passion pour la lecture, le virus des grands livres n’a pas pour autant gagné la bataille du «retour à la normale». On peut en dire autant des musées et des arts vivants.
La réalité, nous la connaissons, hélas: la numérisation est désormais accolée à chaque secteur culturel. Ce serait l’avenir soi-disant radieux et incontournable du «monde d’après»… Ainsi, plus de 60% des Français passent leur temps libre devant les écrans, un taux grosso modo identique pour les Suisses. Et pas pour se rendre dans des salles de cinéma diffusant des chefs-d’œuvre d’Alfred Hitchcock, de Takeshi Kitano ou de Paul Thomas Anderson.
CL’enjeu majeur est pourtant là: que la culture approfondisse et élève la vie intérieure de chacun plutôt qu’elle réunisse dans des bains de foule des «consommateurs» qui, le temps d’une canicule et d’un concert, oublient leur écran vampirique en se souvenant qu’ils font partie d’une humanité suante et dansante. Ultra moderne solitude, chantait Alain Souchon en d’autres temps
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