Abus: s’asseoir et pleurer? Spécial
Ainsi, même dans ce havre, ce haut lieu de spiritualité qu’est Hauterive (FR), des abus ont été commis. Ainsi, plusieurs de nos évêques font l’objet d’enquêtes, soupçonnés d’avoir dissimulé des abus. Qui ont bel et bien existé en Suisse, ainsi que nous le confirme un rapport sans surprise qui qualifie les 1002 cas recensés en cinquante ans de pointe de l’iceberg. Il y a de quoi désespérer au terme d’une semaine chargée, comme à chaque nouvelle révélation. On se demande quand tout cela s’arrêtera, et on sait bien que cela ne s’arrêtera pas: le passé n’a pas fini de dévoiler ses blessures et l’avenir n’en sera pas exempté.
Alors que faire? S’asseoir et pleurer? Oui, s’il s’agit de faire preuve d’empathie avec les victimes, de prendre un temps pour les écouter – ce qui n’a pas ou trop peu été fait – et de les porter dans notre prière. Non, s’il s’agit de s’apitoyer sur la splendeur ternie de l’Eglise et de se recroqueviller sur soi en laissant toute espérance.
La vérité recherchée est un vecteur du message du Christ.
Des hommes (surtout) ont fauté – c’est un verbe plus lourd qu’il n’y paraît – et l’institution a failli. Ces hommes doivent être sanctionnés et accompagnés, l’institution doit être réformée. Rien de cela n’est aisé, mais rien ne peut en dispenser l’Eglise dont chaque organisme, chaque membre disposant d’une quelconque autorité, même infime, est appelé à un profond et urgent examen de conscience. Avec discernement et une volonté réelle de combattre un mal sournois qui ne doit plus jamais pouvoir se dissimuler: aucune mesure de prévention, aucun changement structurel ne parviendra à éliminer complètement les abus, mais la vérité doit toujours triompher.
Car la vérité recherchée, comme la charité témoignée, est un vecteur du message du Christ. Et c’est bien lui, l’Eglise; pas les abus qui, hélas, le mènent aux oubliettes en étouant au passage le témoignage des innombrables prêtres, religieux et laïcs qui suivent ses pas. Pour aller de l’avant, il ne faut rien oublier du passé et du présent, tous deux douloureux. Et surtout pas ceux qui, au milieu des troubles, continuent de marcher avec l’Eglise et le monde à la suite du Ressuscité.
Articles en relation

CES: des mesures immédiates
L’Eglise vit un «changement culturel profond», assure la Conférence des évêques suisses (CES) qui dit assumer «la responsabilité de ce qui s’est passé». Devant la colère des victimes et le désarroi des fidèles, elle a choisi de communiquer le 20 septembre en petit comité dans une salle de l’aumônerie catholique universitaire de Zurich à l’issue de son assemblée plénière à Saint-Gall: Mgr Felix Gmür, évêque de Bâle et président de la CES, Mgr Joseph Maria Bonnemain, évêque de Coire, et Mgr Alain de Raemy, administrateur apostolique du diocèse de Lugano face à trois journalistes, un par région linguistique.

L’Eglise veut espérer
La compassion pour les victimes et la colère à l’endroit des coupables semblent dominer après la publication le 12 septembre du rapport sur les abus commis dans l’Eglise en Suisse (EM 37). Pour les croyants, cela ne doit toutefois pas faire oublier que c’est le Christ qui est au centre de tout.

Quand la bande-son s’arrête
A quoi ressembleraient nos vies si nous évoluions dans une comédie musicale? Si quelques pas de danse accompagnaient nos déplacements, si les percussions nous remettaient dans le rythme lorsque nous faiblissons, si les violons nous aidaient à verser les larmes nécessaires dans les moments de peine et si les cuivres soulignaient succès et bonnes nouvelles? Elles seraient sans doute différentes si le John Williams de La Guerre des étoiles et de Jurassic Park se chargeait de mettre en musique chacun de nos jours avec des éléments de surprise, des leitmotivs et un thème constant pour nous porter.